Impacts de l’IA : risques & opportunités

Depuis son lancement en 2022, le chatbot développé par OpenAI ne cesse de progresser, tant en termes de technologies que d’utilisateurs. Plus de 200 millions d’utilisateurs font appel à ChatGPT chaque semaine. Une demande en nette croissance qui cependant, a un coût, notamment écologique et ce malgré ses possibles applications pour la protection de l’environnement.

L’ IA et son empreinte environnementale : une demande en eau et électricité nécessaire pour son développement et son utilisation

L’engouement pour les modèles d’IA générative de grande envergure, comme ChatGPT, s’accompagne de coûts écologiques que ce soit en électricité ou en eau.  

Selon les projections de l’Agence internationale de l’énergie, la consommation électrique des centres de données et des infrastructures dédiées à l’intelligence artificielle pourrait doubler entre 2022 et 2026. Cette augmentation représenterait l’équivalent de la consommation électrique totale d’un pays comme la Suède ou l’Allemagne.

Développer un modèle comme ChatGPT produit environ 284 tonnes d’équivalent CO2, soit l’équivalent de 300 vols aller-retour entre New York et San Francisco, selon une étude de l’Université du Massachusetts.

Mais l’entraînement n’est qu’une partie du problème. L’utilisation quotidienne de ces IA est également très énergivore. Chaque requête effectuée sur ChatGPT consomme dix fois plus d’électricité qu’une recherche classique sur Google. Aujourd’hui, l’IA est responsable de 0,03 % de la consommation électrique mondiale, un chiffre qui pourrait rapidement augmenter avec l’expansion de ces technologies.

Cette demande énergétique croissante repose également sur les centres de données, épine dorsale de l’IA qui doivent être maintenus à une certaine température pour éviter la surchauffe des serveurs. Pour ce faire, d’imposantes tours de refroidissement sont mises à contribution, évaporant des milliers de litres d’eau froide qui ne peuvent être récupérés. Selon les estimations, l’entraînement du modèle ChatGPT-3 a demandé environ 700 000 litres d’eau – non seulement pour le refroidissement, mais aussi pour la production d’une partie de l’électricité renouvelable qui alimente ces installations.

Dans son dernier rapport environnemental, Microsoft qui a mis au point un partenariat avec Open AI, mentionne une augmentation de sa consommation d’eau globale de 34% entre 2021 et 2022. Soit l’équivalent de 2500 piscines olympiques.

Une étude de la Cornell University établissait en octobre 2023 que l’IA pourrait consommer en 2027 entre 4,2 et 6,6 milliards de mètres cube d’eau : c’est une consommation légèrement supérieure à celle du Danemark. 

Une session de questions-réponses avec ChatGPT-3 consommerait en moyenne un demi-litre d’eau. Avec 10 millions de requêtes quotidiennes, cette demande d’eau commence à entrer en concurrence avec d’autres usages, notamment dans les régions frappées par la sécheresse. À The Dalles, dans l’Oregon, les centres de données de Google ont provoqué des tensions en accaparant un quart de l’approvisionnement en eau de la ville, suscitant la colère des agriculteurs.

L’IA est également pointée du doigt pour son rôle dans l’augmentation de la demande en semi-conducteurs. La production de ces puces nécessite l’extraction de terres rares, souvent réalisée au détriment de l’environnement. En parallèle, la planète fait face à une multiplication des déchets électroniques, toxiques en raison de la présence de plomb, de mercure ou de cadmium.

Face à ces chiffres, les interrogations sur la durabilité écologique des technologies d’IA se multiplient. Alors que l’IA continue de s’intégrer dans nos vies quotidiennes, la question de son empreinte énergétique devient une priorité incontournable.

L’IA, alliée pour la transition écologique

Malgré ce constat alarmant, la 28ème Conférence des Parties sur les changements climatiques (COP28) de Dubaï reconnaissait en 2023, que l’IA allait devenir un instrument majeur de lutte contre le changement climatique.

En effet, des systèmes d’IA sont d’ores et déjà utilisés pour améliorer l’efficacité énergétique, optimiser le chauffage des bâtiments, gérer les flux de circulation, et surveiller la qualité de l’air. Ils sont même capables de prévoir, plusieurs heures à l’avance, la concentration de particules fines dans l’atmosphère. L’IA peut donc se présenter aussi comme une alliée précieuse pour la transition écologique. 

Dans le transport : l’IA peut aider à la gestion des flux et à l’optimisation de plan de circulation, en prévoyant rue par rue et quartier par quartier le trafic, et en ajustant en conséquence les leviers de circulation : ouverture et fermeture de voies, extinction ou allumage des feux tricolores… La capitale estonienne, Tallinn, expérimente depuis 2018 une IA recourant à des caméras permettant de prévoir la congestion de certaines zones. Cette utilisation réduit les embouteillages, et donc l’émission de particules fines. 

Dans la gestion de l’eau : l’IA permet aujourd’hui de prévoir les fuites sur le réseau ainsi que la dégradation de la qualité de l’eau, en les combinant notamment à des données météorologiques. Melbourne, en Australie, utilise aussi l’IA pour réduire la consommation d’énergie nécessaire au fonctionnement du site de pompage, en anticipant la quantité d’eau à traiter pour une journée donnée. 

Dans la construction : l’IA permet notamment d’améliorer la performance et la durabilité des bâtiments. Des systèmes de surveillance et de gestion de l’énergie collectent des données sur la consommation énergétique des bâtiments, permettant  de mettre en œuvre des mesures d’économie d’énergie. 

Préconisations du CESE – 24 septembre 2024

Dans ce contexte très polarisé entre les risques et opportunités de l’IA pour l’environnement, le CESE a adopté un avis « Impacts de l’intelligence artificielle : risques et opportunités pour l’environnement » le 24 septembre 2024, qui comprenait 6 préconisations pour une IA respectueuse de l’environnement :

  • Intégrer les principes d’éco-conception dans les formations des  ingénieurs pour limiter l’impact environnemental dès la conception des systèmes d’IA.
  • Financer des IA à finalité environnementale, au lieu de se concentrer sur des applications commerciales comme le marketing ou la finance.
  • Évaluer l’empreinte environnementale des IA : mettre en place un référentiel pour évaluer systématiquement l’impact environnemental des IA, en demandant transparence et responsabilité aux entreprises.
  • Informer le grand public : lancer des campagnes de sensibilisation pour informer les utilisateurs sur l’empreinte écologique de l’IA et leur permettre de choisir des options plus sobres sur leurs applications.
  • Intégrer des démarches d’éco-conception pour les terminaux, dont le renouvellement est accéléré par l’IA.
  • Encourager la réutilisation d’anciens sites industriels : favoriser la construction de centres de données sur des friches industrielles existantes et valoriser la chaleur résiduelle produite par ces installations pour chauffer d’autres bâtiments.

L’IA peut sans doute être un levier puissant dans la lutte contre le changement climatique, mais sa propre empreinte ne doit pas être ignorée. La transition vers une IA à la fois efficace et écologique est à portée de main, à condition de privilégier une approche responsable. Le défi est désormais d’équilibrer l’innovation technologique avec la préservation des ressources de notre planète.

 

 

 

Les entreprises pour la Cité – N.Ducongé

Sources

CESE : Risques et opportunités de l’IA pour l’environnement – septembre 2024

Nouvel Obs « l’IA sera-t-elle le Titanic de l’environnement ? » – 27 septembre 2024

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