Réfugiés ukrainiens en France : entre accueil favorable et réalités difficiles

Au terme d’une année 2024 marquée par de multiples crises internationales, la France a enregistré un afflux inédit de demandes d’asile.


110.367 premières demandes ont été déposées auprès de l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra), en hausse de 44,7 % par rapport à 2023. À ce chiffre s’ajoutent 22.973 demandes réexaminées, ainsi que 3 681 mineurs non accompagnés enregistrés.


Jamais, depuis près d’une décennie, le pays n’avait connu une telle pression sur son système d’asile.

L’année 2024 est aussi marquée par l’explosion de la demande d’asile ukrainienne qui a été multipliée par 4 par rapport à 2023, avec plus 13 300 premières demandes, soit une première demande sur dix.

La demande afghane de son côté poursuit son recul entamé en 2023 (-37,3% sur un an). Les demandes asiatiques et africaines sont également en baisse, même si la demande africaine représente toujours 40 % des premières demandes d’asile.

La France devient ainsi le premier pays européen pour l’accueil des demandes d’asile ukrainiennes. Selon le rapport annuel 2024 de l’Agence de l’Union européenne pour l’asile (AUEA), publié le 3 mars dernier, la moitié des demandes déposées par des Ukrainiens dans l’Union européenne concernent désormais la France.

Le statut de protection temporaire : une solution provisoire insuffisante

Alors que l’on entre dans la troisième année de la guerre menée par la Russie en Ukraine, ces demandes d’asiles ukrainiennes émanent “en grande majorité de personnes déjà présentes en France et qui étaient sous le régime de la « protection temporaire“, explique l’Ofpra dans son rapport.

Instauré peu après le début du conflit en mars 2022, le statut de protection temporaire accordait aux réfugiés un droit au séjour, au travail, au logement, ainsi qu’un accès immédiat aux soins médicaux et à l’éducation pour leurs enfants. Bien que prolongé jusqu’en mars 2026, ce dispositif ne garantit pas une stabilité à long terme aux familles ukrainiennes souhaitant reconstruire leur vie.

Le dispositif d’accueil français destiné aux Ukrainiens connaît quant à lui des réductions drastiques. De 19.500 places disponibles en centres d’hébergement d’urgence en 2022, il n’en reste plus que 9 000 en 2024, et seulement 4 000 sont prévues pour 2025, selon La Cimade. Par ailleurs, les programmes d’intermédiation locative permettant aux associations de proposer des logements stables voient leurs financements publics fortement diminuer, mettant en péril leur capacité à assurer un accompagnement adéquat.

On peut notamment souligner les difficultés financières croissantes des associations chargées de l’accueil et de l’hébergement, souvent contraintes d’avancer des fonds que l’État rembourse tardivement et de manière insuffisante.

Face à ces difficultés, de nombreux Ukrainiens préfèrent désormais demander l’asile, statut offrant davantage de garanties sociales mais alourdissant le système administratif français, déjà saturé par les demandes. Ce changement de démarche reflète aussi une baisse significative du souhait de retour en Ukraine, passant de 52 % en 2023 à seulement 31 % en 2024, toujours selon l’AUEA.

Un contexte européen défavorable

Au-delà des frontières françaises, le soutien aux réfugiés ukrainiens diminue également dans plusieurs pays européens. L’Allemagne, l’Estonie et la Suisse ont récemment réduit leurs aides et restreint l’accès aux prestations sociales. En Suisse, la protection temporaire est désormais limitée aux seules personnes venant de régions directement affectées par les combats. Ces restrictions européennes exacerbent les incertitudes et les difficultés auxquelles sont confrontés les réfugiés ukrainiens, tant dans leur pays d’accueil que pour envisager un éventuel retour.

Le programme Levier pour l'insertion professionnelle des réfugiés

Depuis 2020, le programme LEVIER accompagne les personnes réfugiées dans leur parcours d’insertion professionnelle, tout en mobilisant les entreprises et leurs collaborateurs pour bâtir un écosystème inclusif, propice à leur intégration durable dans l’emploi.

Une nouveauté marquante en 2025 : pour la première fois, une promotion entière du programme est exclusivement composée de femmes réfugiées.

« En 2024, notre programme d’insertion professionnelle a obtenu des résultats encourageants que nous souhaitons inscrire dans la durée. Dans un contexte économique particulièrement tendu, le soutien des entreprises — à travers le mécénat financier et de compétences — est plus que jamais indispensable pour poursuivre notre mission auprès des personnes réfugiées. »


Cécile DECKER, Directrice du programme LEVIER

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