« Regards croisés sur le handicap : entreprises et étudiants »

Lors de l’événement organisé le 5 avril dernier par LepC et intitulé « Regards croisés sur le handicap : entreprises et étudiants », les résultats de l’étude de Natacha SCHOEN, Master 2 psychologie sociale, du travail et des organisations à l’Université de Strasbourg ont été présentés. Cette étude a été menée en 2021 auprès de 199 étudiants en situation de handicap. Ces résultats ont fait l’objet d’une comparaison, côté entreprises, avec les résultats issus du 9ème Bilan diversité dont la restitution a eu lieu le 15 février dernier. Ces deux études ont permis d’apporter des visions différentes de la perception du handicap à la fois côté étudiants et côté entreprises. 

D’après le 9ème Bilan Diversité, le handicap est le premier sujet de sensibilisation avec notamment l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes.

Pourtant, on peut constater que 30 ans après l’obligation légale faite aux entreprises d’avoir 6% de travailleurs handicapés, ces derniers ne représentent que 3,5% des effectifs, tous secteurs confondus. De même, le taux de chômage des personnes en situation de handicap atteint 14%, contre 8,1% pour la moyenne nationale de l’ensemble de la population française.

Si les recruteurs estiment généralement que l’image des personnes en situation de handicap s’est améliorée au cours des 3 dernières années (57 %), ils estiment toujours que leur recrutement est difficile à réaliser. Malgré le cadre légal, il y a souvent des préjugés mutuels.

Côté étudiants, plus de 67% d’entre eux estiment que leur handicap est une difficulté supplémentaire à leur insertion professionnelle et plus de 65% ont une appréhension à l’évoquer. Parmi les raisons invoquées, sont citées : « Manque de productivité pour un employeur » « Incompréhensions de l’employeur » « Appréhension » « Problème d’accessibilité des structures ».

80% des handicaps sont invisibles et pourtant en entreprise, les dirigeants et recruteurs sont seulement 9% à donner cette réponse. La grande majorité d’entre eux (47%) pensent que le handicap invisible représente 40% des handicaps et plus d’1/4 d’entre eux pensent même que le handicap invisible ne représente que 20% des handicaps.

D’après l’étude de Natacha SCHOEN “insertion professionnelle des étudiants en situation de handicap ” concernant les moyens donnés aux étudiants en situation de handicap, 90% d’entre eux  n’ont pas connaissance des ressources mises en place par les universités et plus de 87% n’ont jamais participé à des événements organisés par les référents handicap ou leur partenaire. S’il y a un réel intérêt pour ce que peuvent proposer les missions handicaps, il y a vraisemblablement  un déficit de  connaissance.

Dans leur recherche d’emploi, 81% des jeunes n’ont pas pu identifier un contact privilégié au sein de l’entreprise pour répondre aux questions concernant leur handicap que ce soit un référent handicap, un chargé de mission diversité. Pourtant une fois identifié, ils font presque tous le choix de le contacter. De leur côté quand on interroge les entreprises sur ce sujet, une organisation sur deux considère la mise en place du référent handicap comme efficace.

L’évocation du handicap lors de l’entretien de recrutement est citée à 92% par les recruteurs comme une bonne pratique, et parmi eux, 65% invitent les candidats à le mentionner sur leur CV (6 jeunes en situation de handicap sur 10 affirmaient ne pas l’indiquer). Les employeurs se montrent par ailleurs plus ouverts à l’emploi des personnes handicapées que l’ensemble des Français. 9 recruteurs sur 10 encouragent même les candidats à aborder ce sujet.

Une fois dans l’entreprise, un salarié sur deux n’en parle pas: 53% n’identifient pas les avantages à le déclarer et 35% craignent un changement de comportement de leur hiérarchie.

40% des travailleurs en situation de handicap rencontrent des difficultés concernant l’aménagement des postes de travail ( horaires de travail aménagés, espace de travail adapté, décomposition des tâches, congés pour rdv médicaux, écran ou clavier adaptés…).

Sur le sujet des apports à l’entreprise de la présence de personnes en situation de handicap, 51% des salariés estiment qu’”avoir un collègue handicapé contribue à changer le regard porté sur le handicap“. 74% des salariés ont conscience que des aménagements peuvent être nécessaires et 80% perçoivent ces adaptations comme une opportunité de mettre en place de nouvelles manières de faire sans que cela ne modifie leurs conditions de travail.

62% des dirigeants et responsables RH et 52% des salariés estiment que cela améliore la solidarité entre les collaborateurs, les managers et les équipes.

A l’issue de cette restitution d’étude, deux étudiants vivant avec un handicap sont venus témoigner sur les difficultés rencontrées lors de leurs études ou en entreprise et ont apporté leur témoignage sur les chiffres dévoilés.

Bastien PONSARD: diplômé en Master en mathématiques et statistiques, actuellement en recherche d’emploi, avec un trouble du Spectre Autistique et asperger : « Au collège et au lycée j’ai reçu des cours particuliers. Je n’ai pas pu bénéficier tout de suite de cet accompagnement qui arrivait assez tard ( souvent après les fêtes de noël) dans l’année scolaire. Par la suite, j’ai découvert le monde de l’entreprise à travers des stages. Les difficultés rencontrées étaient essentiellement dues aux consignes qui m’étaient communiquées à l’oral par mon tuteur. Pour me permettre d’exécuter mes taches, il me faut des consignes écrites claires et précises…  Sur les chiffres cités : en tant que personne en situation de handicap, on sait que 80% des handicap sont invisibles mais peu de gens le savent. Il faudrait sensibiliser davantage sur ce handicap invisible. »

Tim GEIGER: 24 ans étudiant à l’Université de Strasbourg en management, actuellement en année de césure afin de réaliser des stages en entreprise. Malvoyant depuis 2 ans : « J’ai découvert le monde du handicap récemment.  La principale difficulté rencontrée est liée à ma perte d’autonomie notamment pour me déplacer entrainant une perte de confiance. J’ai pu bénéficier de certains aménagements à l’université, mais c’est à moi de m’adapter désormais à ces nouvelles difficultés. Je dois me challenger. La difficulté en entreprise vient tout d’abord des barrières que l’on se met soi-même. J’ai postulé à différents stages avec des refus mais sans savoir précisément si ces derniers étaient liés à mon handicap. Aujourd’hui dans l’entreprise où j’effectue mon stage, je dispose d’un ordinateur « classique » et je n’ai pas d’aménagement particulier, mais mon manager est assez à l’écoute. J’ apprécie sa bienveillance. »  

Pour visionner le replay de l’événement du 5 avril : https://youtu.be/cFtgYAQ-zMg

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